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Afaccc 09/31
C'est fini les chiots à la maison !
Ou alors, vous n’aurez plus le droit de les vendre. Des éleveurs et le Gouvernement s’attaquent aux portées produites par les particuliers, le percepteur se frotte les mains... et la cynophilie va trinquer.
Article Nos Chasses N°668 - Thierry Delefosse
Le monde de la chasse s'est beaucoup mobilisé sur certains aspects de la Loi d'avenir agricole, promulguée le 13 octobre 2014. il en est un pourtant très grave qui passe inaperçu et sur lequel nous avions alerté nos lecteurs il y a plus d'un an : l'interdiction, pour les particuliers, de vendre la portée de chiots nés à la maison.
Sous couvert de lutte contre le trafic des chiens, des intérêts purement mercantiles visent à enlever aux Français une liberté de plus, celle de produire à la maison une portée de temps en temps, souvent une ou deux, pas plus, dans la vie d'une chienne. En général, il y a un chiot pour le propriétaire du mâle, un autre offert au gamin qui a tout juste passé son permis de chasser, un autre à un ami qui vient de perdre son vieux chien, deux vendus pour amortir les frais liés à la portée (vétérinaire, aliments spécifiques, vaccins, tatouages ou puces, déclarations de naissance à la Canine, etc.). Et ma foi, s'il en reste deux ou trois, leur vente permet d'acheter quelques sacs de croquettes et cela n'a rien d'immoral. Mais si le Gouvernement prend l'ordonnance prévue par la loi, ce sera fini : plus de naissances à la maison. Enfin, cela restera possible mais il faudra les donner et vu les frais et le travail que cela engendre, cela revient à l'interdire.
Dans sa question posée au gouvernement (Question publiée au j O le 24 février 2075 page 7249 – Réponse publiée au J O le 37 mars 20i5 page 2480), la Député socialiste du Rhône Pascale Crozon défend les « éleveurs canins, confrontés à ce qu'ils considèrent être une concurrence déloyale.../... et un véritable tra?c de chiens. En effet, l'article L. 274-6 du code rural prévoit implicitement la possibilité pour des particuliers de vendre des chiots sans prendre le statut de professionnels. Ces particuliers échappent ainsi à la TVA, I S et cotisations sociales. »
Trafiquant et resquilleur
Eh oui, vous qui produisez une portée tous les 36 du mois, vous êtes un disciple de Cahuzac ! Et d'évoquer les règles sanitaires qui ne seraient pas respectées, les marchés aux chiens, les importations d'Europe de l'Est, etc. Entendons-nous bien: que ces actes coupables existent, c'est possible et même probable, mais ils ne concernent pas les producteurs occasionnels que sont généralement les chasseurs, et ne sont qu'un prétexte pour les taxer. Et pour cela, on peut faire confiance au Gouvernement qui empaume la voie plus sûrement qu'un pointer devant une compagnie de perdreaux remisée dans les betteraves.
« Le Gouvernement entend ainsi rendre obligatoire la déclaration en tant qu‘éleveur dès la première portée commercialisée répond le Ministre de l'Agriculture à l'honorable parlementaire.»
Puisqu'il défend les chasseurs et le monde rural, nous avons demandé à Frédéric Nihous, Président de CPNT son avis sur la question. Sa réponse est mesurée – plus que notre indignation, sans doute due au souvenir de deux portées par décennie à la maison du temps de notre enfance et adolescence - et assez sage.
« Les éleveurs n'ont pas tout à fait tort, puisque la loi autorisait auparavant les particuliers à produire deux portées par an. C'était beaucoup trop et loin de la portée «pour faire du bien à la chienne » ou pour assurer sa descendance. J'ai connu des chasseurs qui n'hésitaient pas à faire reproduire leur chienne toute sa vie chaque année.
Le problème dans ce pays, c'est que l'on va toujours d’un extrême à l'autre. Faire le ménage pour empêcher de produire n'importe comment, de réaliser effectivement une concurrence déloyale contre des professionnels, et s'attaquer au trafic de chiens : oui! Taxer les particuliers dès la première portée: non! Il faut trouver une mesure intermédiaire. Mais le Gouvernement qui a toujours besoin d'argent a sauté sur l'occasion. C'est une dérive très dangereuse car demain, on pourra taxer les sauvaginiers qui vendent quelques canards appelants pour protéger les intérêts des éleveurs déclarés.
CPNT aurait d'autres pistes à proposer: par exemple taxer les associations écolos qui disposent de territoires publics, de subventions publiques, et qui font payer les visiteurs à leurs nuits de la chauve-souris ou du crapaud, ou autres. »
Sacré Fred, toujours de bonnes idées...
Une mesure contre-productive et une belle c...
Pour en revenir au sujet, d'accord, la loi était trop laxiste, et il y a eu des abus mais il serait très facile de prendre des dispositions pour les faire cesser.
Manifestement, l'objectif est d'en profiter pour régler le compte des particuliers honnêtes.
Le plus grave est qu'en faisant mine de se tromper de cible, le Gouvernement et les éleveurs ne vont pas servir la cause cynophile. En effet, il est relativement facile de savoir ce qui va se passer. La production de chiots à la maison diminuera, mais ne s'arrêtera pas.
C'est un mystère pour personne: les temps sont durs. Et ceux qui aujourd'hui rechignent à mettre un peu moins ou un peu plus de 1 000 euros pour acheter un chiot auprès d'un professionnel rechigneront tout autant demain. Soit ils n'auront plus de chien – bravo la promotion de la belle chasse - soit ils achèteront encore à un particulier, sous le manteau. Bien sûr, il y aura des contrôles, tant fiscaux que sanitaires, mais à ce jeu, les Français sont champions.
Et la grande perdante dans cette affaire risque fort d'être la vénérable Société centrale canine. En effet, actuellement, pratiquement tous les chiots de race naissant chez les particuliers" sont déclarés et enregistrés au Livre des Origines Françaises. A partir du moment où on ne pourra plus les vendre, ou à un coût moindre, plus de déclarations et plus de pedigrees: ça fera des économies. Et on ne parle même plus de l'adhésion aux clubs de race.
« De toute façon tu connais la mère, tu chasses avec nous tous les dimanches. Et le père, c'est le Taïaut du Jacques. I l est extra, tout le canton le connaît ! Ou alors, tu vas acheter un chiot chez X mais ce sera pas le même prix et il ne sera pas si bon. »
On les entend d'ici. Et on imagine les dérives alors que le système fonctionnait bien. Des races bien fixées risquent de connaître des itinéraires inattendus. Il faut quand même sacrément manquer de jugeote et de sens de la mesure pour pondre de telles lois.
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