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bonsoir,
Cette histoire est vraie. Je ne l’ai pas vu de mes yeux, mais une personne de confiance me l’a rapportée.
Cela s’est passé il y a quelques années dans les hautes corbières, sous le regard protecteur et bienveillant des ancestrales citadelles cathares, dans un biotope magnifique, sec, escarpé, battu par les vents de cers et de marin, planté de chênes verts et d’arbousiers. C’était à l’époque où la chasse du sanglier en battue a commencé à se structurer sous la pression des règlements : identification des postes, port du gilet fluo, lecture des consignes de sécurité avant chaque départ à la chasse. C’est à Georges, le président que revenait naturellement la fastidieuse et néanmoins indispensable charge de répéter les consignes, battue après battue. Conscient que le principal risque d’accident était le tir direct sur un autre chasseur ou sur un promeneur, il martelait inlassablement qu’il faut « I-den-ti-fi-ERRR le gibier avant de tirrerrr ». Sa voix rocailleuse résonnait sous les voûtes de la cave coopérative désafectée qui servait de local de chasse. Si le président était doté d’une voix puissante, son ouie était au contraire très défaillante. Saint Hubert n’avait pas non plus jugé bon de l’investir d’un sixième sens cynégétique, si bien qu’il n’avait que très exceptionnellement l’occasion de faire résonner les barres calcaire des 4 coups de trompe qui saluaient traditionnellement le prélèvement d’un sanglier.
Bref, la saison avançait et Georges voyait à chaque battue s’approcher la déshonorante perspective d’une bredouille. Ce jour là il faisait un temps magnifique. Alain, le chef de battue le place « au balcon », un rocher escarpé surplombant de nombreux éboulis de calcaire qu’on appelle chez nous des clapisses : « Aujourd’hui, c’est garanti, si on lève un sanglier, il viendra passer là…en plus avec le temps qu’il fait, il va l’entendre arriver dans les cailloux ! ». En effet, les chiens lèvent et la menée soutenue se rapproche du poste de Georges. Un coup de feu claque. Un seul, c’est bon signe. Les chiens approchent du poste……et continuent leur course rectiligne à flanc de montagne. Coup de téléphone portable :
- Allo, Alain ? dit une voix nouée d’émotion
- Ben oui…….
- Je l’ai eu !!
- Tu l’as eu quoi ? les chiens ne se sont pas arrêtés. Il y en avait plusieurs ?
- Non, c’est un chevreuil qui se dérobait. Le sanglier, je l’ai pas vu.
- Bon, c’est bien. Gilles doit partir de bonne heure, il t’amène le bracelet.
13 heures, Gilles passe au poste d’Alain pour récupérer le bracelet et descend voir Georges. Nouveau coup de téléphone :
- allo Alain ?
- ben oui !!!!
- c’est pas un chevreuil, c’est, c’est …….. un Isard !!
- pardon ?!..................
l’Isard, que rien ne pouvait plus rendre à la vie, finit discrètement dans un congélateur et servit de chevreuil lors du repas de chasse annuel.
Depuis ce temps là, la cérémonie des consignes de sécurité donne lieu à quelques coups de coudes et rires étouffés. Le bestiaire fantastique de nos montagnes qui était déjà peuplé du Dahu s’est également enrichi d’un nouvel animal qui a pendant longtemps hanté les nuits de Georges et les apéros d’après chasse : le chevrisard !!
_________________ Il est un plaisir plus grand que celui de tuer : celui de laisser la vie http://desindomptablescathares.chiens-d ... ndeen.html
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